jeudi 29 mars 2012

7- Le livre "Un portrait de moitié Claire"



      Hier matin, j'ai enfin reçu par la poste quelques exemplaires de mon livre "Un portrait de moitié Claire " je l'avais quand même découvert auparavant au salon du livre…
      La couverture me parle, ce n'est certes pas la meilleure image de couverture que j'ai dessiné, mais je l'a sens juste. Je me souviens que je voulais montrer le corps nu de Claire. Je vois maintenant que j'avais fait le choix, sans l'avoir formulé, d'éviter farouchement de faire une image racoleuse avec la nudité, ou une image provocante. Je voulais aussi une nudité frontale, comme quelque chose de consenti, de digne ou d'assumer.
Parfois pour certain livre le choix de l'image de couverture est difficile, pour "Racines" j'ai essayé une vingtaine  d'images. La couverture de "Quelqu'un va venir", j'ai dessiné une image, c'était la  bonne! Pour Claire j'ai essayé trois images. La couverture est un paradoxe qui essaye de rendre compte d'une singularité pour accéder au monde.
       Je feuillette les pages, je regarde, ne pense rien, j'évite, c'est trop tard. Je reste accroché à deux pages, début de chapitre,  "Le rêve de Claire",  j'aurai du les inverser, mettre la page des deux visages à gauche et la page avec le texte "Claire" en page de droite. Trop tard. Je referme.
       Je ne sais pas quoi en faire. Pourtant ce n'est qu'un livre. Pasolini disait devant la montagne que représente la réalisation d'un film (de mémoire): pourquoi réaliser un film alors que le rêver est déjà tellement.
        Je sais dans quelle direction aller pour mon prochain projet. Je pense souvent aux films de Naomi Kawase  plus précisément à ses documentaires qui film magnifiquement et si terriblement sa grand- mère. Mais pour commencer ce projet  il faut accepter des temps que je ne peux pas compresser, apprendre à attendre, repeindre mon intérieur. Déplacer des meubles. Aller à la déchetterie,  me défaire pour me laisser faire. J'ai déjà commencé par ranger mon bureau, acheté des pinceaux, j'ai mis plusieurs jours avant d'oser m'en servir, mais maintenant ça va je dessine "Monsieur TOUTtaCOUP".
         Enfin j'essaye! J'ai commencé une bande dessinée en trente pages pour les tout petits à partir de 3 ans, j'ai appelé l'histoire "MONSIEUR TOUTtaCOUP" parce que ce qu'il lui arrive,  lui arrive tout à coup. C'est agréable de dessiner d'une  autre façon, de penser autrement, je crois que ça m'aide à mettre de la distance avec Un portrait de moitié Claire.


dimanche 4 mars 2012

6- Le livre "Un Portrait de Moitié Claire"


Impression chez SEPEC Imprimerie 23/24 Février 2012…
      
      Le livre est imprimé. En participant à l'impression je ferme symboliquement le livre. J'appréhende ce moment et je suis heureux de participer à cette finalité. C'est important pour moi d'aller jusque là, de rencontrer les personnes qui font ce travail, de ne pas les laisser seul face aux choix des pages. Les premières pages sont difficiles à estimer, il me faut un certain temps pour que mon œil s'adapte à ces nouvelles couleurs, à la densité, au contraste.  C'est curieux de constater comment l'œil au fur à mesure des pages augmentent sa sensibilité. Les choix sont ma responsabilité par rapport à mon livre et par rapport à l'engagement de mon éditeur.
       J'ai aussi un plaisir à voir les images exister sur le papier du livre. C'est par cette porte que passe mes rêvent...
       Et puis, c'est dans cette situation que je confronte la réalité artistique, à la réalité économique. Je retrouve les limites matérielles, financière, la réalité du monde du  travail qui est le quotidien de beaucoup de personnes, que j'ai quitté par choix pour suivre ce que je fais, aujourd'hui. (Et que j'oublie en faisant un travail artistique). Je retrouve cette période troublante de mon adolescence où j'étais apprenti ajusteur dans une grande usine mécanique. J'ai connu le monde ouvrier, l'univers des machines, les horaires, les trois huit, les espaces vident et plein, bruyant, qui ne ressemblent à rien mais que je reconnais. Un jour je ferai un livre pour raconter cette période…
        En explorant aujourd'hui un travail artistique, je regarde les valeurs qui soutiennent le "travail conventionnelle" par rapport à un "travail artistique". Je vois que la production du monde du travail est dépendante d'un cadre précis, d'une gestion du temps, d'horaires incompressibles, de règles à respecter, une volonté d'éliminer les risques, d'anticiper,  de prévoir, exploiter au maximum un rendement par apport à un marché etc … Je vois que les conditions pour prétendre à un travail artistique sont de déroger à ces valeurs et de prendre le risque de réinventions de ces valeurs…
        
        Je regarde les grandes feuilles où sont imprimés têtes bêches dans un désordre précis les pages, même si mon exigence obsessionnelle et chronique est mise à l'épreuve, l'impression est bonne.
Merci à  toutes les personnes qui ont travaillé pour la fabrication de ce livre.